AUTOUR DE YAABA – FORUM
A l’instar de Thomas Sankara, travers une vision critique de la société africaine, Idrissa Ouedraogo plaidait pour l’entraide, l’ouverture d’esprit, le progrès. Tout en ciselant un drame émouvant, qui, dès ce second long métrage, montrait le pouvoir de séduction de son cinéma. Une démarche très réfléchie, qu’il éclairait en déclarant : « Je déplore que l’image du tiers-monde et de l’Afrique en particulier, véhiculée au cinéma à l’étranger et même par certains cinéastes africains, soit trop souvent exclusivement liée à la misère des hommes. La joie, l’amour, la haine, le combat optimiste, qui sont des éléments universels, ne doivent pas être exclus. »
Les questions que nous nous posions à l’époque et qui nous semblent sont toujours d’actualité sont celle-ci : comment un art importé comme le cinéma peut prendre sa place dans une culture traditionnelle, comment les arts de la tradition peuvent à leur tour nourrir cet art importé, comment ils peuvent lui donner une originalité, le considérer comme une technique, et charger finalement cette technique de leur propre culture ? Ce sont des questions que beaucoup de cinéastes africains se posent. Il est évident que le développement des cinémas africains ne pourra résulter que de son appropriation véritable par les structures africaines, qu’il sera d’autre part nécessairement le fait du rapprochement des films et des publics africains. (in Dossier de presse de Yaaba, 1989)
Olivier Barlet évoque ici des critiques africaines faites à Yaaba, et les réponses d’Idrissa Ouedraogo
Mais depuis le milieu des années 90, le cinéma africain intéresse beaucoup moins. Avec Pierre Agthe (ancien directeur de Focal) et Thierry Spicher (Box Productions Outside the Box), nous avons rencontré la plupart des producteurs et réalisateurs burkinabè et avons décidé ensemble de renforcer la production de films low low budget au Burkina Faso — des films simples, voire parfois élémentaires, réalisés avec très peu de moyens à l’intention du public local, mais qui rencontrent régulièrement de grands succès dans les salles. Depuis 2012, le projet existe, soutenu à bout de bras pour l’heure par la Direction suisse du développement et de la coopération (DDC) à Ouagadougou.
Revisitons ces nombreuses questions concernant la situation du cinéma africain tel que je l’ai pratiquée à la fin des années 80, en comparaison avec la situation actuelle, et d’une manière plus générale, questionnons ce que signifient entraide et solidarité à l’égard de l’Afrique, où tout n’est de loin pas irréprochable.
En compagnie de Thierry Spicher, Mohamed Challouf, réalisateur tunisien, et Philippe Fayet coordinateur du bureau de la Direction suisse du développement et de la coopération (DDC) en Afrique de l’Ouest, qui a oeuvré prendant plus de 30 années en Afrique noire francophone, ainsi que quelques autres invités encore à confirmer.